Vivo – Le Souffle entre les Mondes

Dans le murmure délicat de l’aube ou dans l’immobile douceur du crépuscule, une mélodie légère et envoûtante peut s’élever d’un simple souffle, non pas porté par la bouche, mais par le nez.
C’est la voix du vivo, la flûte nasale de Tahiti, un instrument qui porte l’esprit.

Sculpté dans le bambou et joué avec une seule narine (l’autre soigneusement fermée), le vivo livre un son intime et aérien, à la fois proche et presque immatériel.
Mais pourquoi le nez ?
Dans la vision polynésienne, le nez est sacré. La bouche peut mentir, maudire ou dissimuler ; le nez, lui, ne libère qu’un souffle pur, silencieux, l’essence même de l’être.
Jouer du vivo, c’est respirer la vérité, laisser le mana s’exprimer directement depuis l’âme.

Le vivo était un pont entre les mondes.
Autrefois, on le jouait lors des cérémonies sacrées, tissant un lien entre le monde des humains et les dimensions subtiles des esprits, Te Pō, l’invisible.
Ses vibrations étaient réputées éveiller la présence des ancêtres, apaiser les énergies et appeler les guides au-delà du voile.

Aujourd’hui, ce souffle ancien perdure grâce aux gardiens culturels et aux artisans qui veillent à sa transmission.
Son murmure est discret, mais sa force est immense : un rappel doux mais profond que les vérités essentielles ne naissent pas du bruit, mais du silence… de l’immobilité, et du souffle le plus authentique en nous.

 

*** Photo credit: Photothèque du Musée de l’Homme